Un travailleur malade de longue durée qui ne coopère pas à un trajet de réintégration perdra une partie de son indemnité. La Chambre a approuvé la loi dont les mesures entreront déjà en vigueur le 1er janvier. L’employeur aussi sera passible d’une amende. Cette responsabilisation financière s’inscrit dans le cadre du plan Retour au Travail (ReAT) du ministre Vandenbroucke. Grâce à ce plan, le gouvernement vise à remettre au travail un maximum de ‘malades aptes au travail’.
Aujourd’hui, un salarié en incapacité de travail en raison de problèmes de santé continue d’être payé le premier mois par son employeur, et retombe ensuite à un maximum de 60 % de son dernier salaire, payé par l’assurance maladie. Notre pays compte actuellement environ 500.000 malades de longue durée, à savoir des travailleurs qui sont en incapacité de travail depuis plus d’un an. Inutile de dire que cette situation coûte énormément d’argent et constitue également un problème social chronique.
En 2019, Plus de 1,5 milliard d’euros ont été dépensés en indemnités pour les incapacités de travail de longue durée causées par une dépression ou un burn-out. Suite au Covid, ce montant va encore augmenter de façon exponentielle.
Responsabilisation des employés
Des études révèlent que lorsqu’on est malade, il est important de « s’atteler à se remettre au travail » le plus rapidement possible, car cela augmente considérablement les chances de se réinsérer harmonieusement et durablement sur le marché du travail. C’est la raison pour laquelle le trajet d’accompagnement constitue le pilier central du plan ReAT.
L’objectif du nouveau projet de loi est d’inciter les travailleurs qui ont été déclarés en incapacité de travail à reprendre une ‘forme élémentaire de collaboration’. Et ce en procédant à une évaluation de l’état de santé et en ayant un entretien pour envisager une reprise du travail.
Concrètement, on attend du travailleur qu’il coopère à deux niveaux :
- Le salarié doit fournir les informations nécessaires pour procéder à une (première) évaluation de son état de santé. Il bénéficie pour cela de l’aide d’un coordinateur de Retour au Travail. S’il ne donne pas suite à cette demande, le travailleur sera invité par le médecin-conseil à se soumettre à un examen médical afin de recueillir les informations nécessaires.
- Le salarié doit répondre à l’invitation du coordinateur de Retour au Travail pour une première prise de contact dans le cadre d’un trajet Retour au Travail.
Un incitant supplémentaire est également prévu : si le travailleur malade de longue durée ne donne pas suite à ces invitations sans motif valable, il sera privé d’une partie de son indemnité. Les modalités concrètes et le pourcentage exact ne sont pas encore connus, mais le plan ReAT actuel évoque un maximum de 2,5 %.
Le projet de loi a été adopté le 22 septembre 2022 mais n’a pas encore été publié au MB.
Le projet de loi doit entrer en vigueur le 1er janvier 2023 et s’appliquera aux bénéficiaires dont la période d’incapacité primaire commencera au plus tôt le 1er janvier 2023.
L’employeur risque lui aussi une amende
Les mesures ReAT sont une arme à double tranchant. Les employeurs ont eux aussi leur part de responsabilité. Les entreprises – de 50 salariés en moyenne – qui ont un nombre d’entrées en incapacité de travail de longue durée (invalidité) supérieur à la moyenne parmi leurs salariés (de moins de 55 ans et comptant au moins 3 ans d’ancienneté dans l’entreprise) devront s’acquitter d’une cotisation patronale spécifique de 0,625 % sur le total des salaires trimestriels (soit 2,5 % sur base annuelle).
Sur la base des premières simulations, quelque 190 entreprises seraient actuellement redevables d’une cotisation trimestrielle pour un montant global de 1,275 million d’euros. Les premières notifications seront encore envoyées en 2022 (dès après la publication des textes réglementaires). La première cotisation sera calculée au deuxième trimestre de 2023.
Le projet de loi est toujours pendant à la Chambre.
Gain social
Outre le coût lié à la maladie de longue durée, le fait de reprendre le travail présente évidemment aussi un avantage important pour le travailleur.
Des recherches ont démontré qu’un « bon » job, adapté aux capacités et aux attentes du travailleur, a un effet positif sur sa santé mentale. Les personnes qui travaillent, et qui se sentent valorisées parce qu’elles se rendent utiles, contribuent au bien-être de l’ensemble des citoyens. Le gain social est important. Les entreprises prennent elles aussi de plus en plus conscience de la nécessité d’organiser le travail de sorte à éviter que leurs salariés ne tombent en incapacité de longue durée.
Pour les responsables des ressources humaines, les cadres et les entrepreneurs, le bien-être de leurs salariés constituera une priorité absolue dans les années à venir. C’est ce qui ressort d’une enquête de SD Worx menée dans 14 pays européens, parmi lesquels la Belgique. La raison en est évidente : des salariés heureux et en bonne santé sont plus motivés et… moins susceptibles de tomber malades.
La déconnexion numérique devient un droit
Le projet de loi vise également à limiter l’utilisation des outils numériques afin de pouvoir mieux concilier vie professionnelle et vie privée. Le législateur entend ainsi lutter contre les risques psychosociaux comme le burn-out.
Le projet de loi stipule que le droit à la déconnexion numérique doit être entériné par une convention collective de travail, en vue d’inciter les entreprises à limiter l’utilisation des outils numériques. Ce projet de loi a un impact positif sur la qualité du travail car ces mesures permettront de respecter les restrictions en matière d’heures de travail, de temps de repos et de congés annuels. Ce qui permettra automatiquement de mieux concilier vie professionnelle et vie privée, et donc de limiter les risques psychosociaux comme le burn-out.
Le projet de loi est toujours pendant à la Chambre.